Une vraie loi pour que les multinationales n’échappent plus à leurs responsabilités !

Avec l’aide précieuse de la société civile (WSM, Entraide & Fraternité, et la Coalition…), j’ai déposé fin novembre une proposition de résolution à la Chambre des représentants afin d’aboutir à une vraie loi sur le devoir de vigilance en Belgique. Pour que les victimes de violations de droits humains puissent poursuivre les multinationales responsables en justice.

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Le problème

Alors que les États doivent respecter les droits humains, de nombreuses multinationales échappent à toute forme de responsabilité. Des grandes marques comme Adidas ou Zara bénéficient de l’esclavage des Ouïghours en Chine, en se cachant derrière leurs filiales. D’autres géants banquiers … Le problème est que ces grands groupes privés ont réussi à délocaliser leur production, mais du coup aussi leur responsabilité vis-à-vis des droits humains !

Qu’est-ce que le devoir de vigilance ?

Et c’est exactement ça que vise cette proposition de résolution : je veux les rendre responsables des violations des droits humains et destructions environnementales sur toute leur chaîne d’approvisionnement.

À l’ONU

Pour une efficacité mondiale, l’instrument nécessaire est un traité international contraignant afin que toutes les entreprises, partout dans le monde, puissent être redevables de leurs actes et soumises à des sanctions effectives.

Le 26 juin 2014, une étape importante a été franchie en ce sens. En effet, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a adopté, à l’initiative de l’Équateur et de l’Afrique du Sud, la résolution 26/9, établissant un groupe de travail intergouvernemental dans la perspective de l’établissement d’un traité contraignant au niveau global : le Binding Treaty. L’objectif est notamment de donner l’accès à une voie de recours juridique aux personnes victimes des pratiques d’une multinationale, comme par exemple l’accaparement de leurs terres, la violation des droits humains, une atteinte à leur intégrité physique ou mentale, etc., et de leur permettre d’obtenir réparation pour le préjudice subi.

Encadrer les multinationales par de telles règles contraignantes est une nécessité et c’est ce que l’on cherche à mettre en place quand on parle de « Devoir de vigilance et de respect des droits humains » (Human Rights Due Diligence en anglais). En effet, les atteintes aux droits humains et à l’environnement sont une réalité omniprésente, notamment au sein des chaînes d’approvisionnement de la grande distribution. La plupart des enseignes affichent pourtant un code de conduite censé garantir le respect des normes sociales et environnementales.  Mais ces initiatives volontaires de responsabilité sociale des entreprises et/ou l’utilisation de labels ne sont souvent pas suffisantes pour assurer la prévention de telles atteintes et instaurer la transparence sur les conditions de production des biens que nous consommons.

Nous soutenons aussi une initiative européenne pour adopter les mêmes règles sur tout le continent.

Au niveau domestique

Le devoir de vigilance n’est pas un concept idéaliste ou utopique ; en effet, depuis mars 2017, c’est une loi de ce type qui est rentrée en vigueur en France. Certes, cette loi comporte des faiblesses – comme le fait qu’elle ne touche que les quelques entreprises ayant plus de 5000 salariés en France, ou plus de 10.000 salariés dans le monde – et après deux ans d’existence, la société civile française estime que les entreprises peuvent mieux faire, mais elle a le mérite d’exister. Et si d’autres initiatives similaires sont en train de se développer en Europe et dans le monde, la France reste pionnière en la matière.

En Suisse, un référendum était organisé à ce sujet ce dimanche 29 novembre. Hélas, si une majorité de Suisses a voté en faveur de l’initiative pour rendre les 1500 multinationales du pays redevables de leurs infractions aux droits humains et environnementaux, le “non” l’a emporté dans une majorité de cantons.

Chez nous, le plan d’action national belge pour les entreprises et les droits de l’Homme, adopté en juillet 2017, est très faible et ne prévoit aucune mesure contraignante. Il ne contient ni stratégie à long terme, ni approche concrète. Il n’y a pas non plus de budget pour sa mise en œuvre.

Mais aussi, nous visons une vraie loi sur le devoir de vigilance des plus grosses boites en Belgique ! L’idée est de pouvoir poursuivre le patron d’une multinationale en justice si elle exploite des esclaves ouïghours ou saccagent l’environnement.

Voilà un énorme chantier qui s’ouvre !