L’extradition de Julian Assange marquerait un dangereux précédent pour les droits des journalistes et lanceurs d’alerte

Un tribunal londonien doit rendre le 4 janvier prochain une décision sur l’extradition de Julian Assange aux USA. Il est détenu dans l’isolement total dans une prison de haute sécurité.

Selon Amnesty International, son extradition aurait de lourdes conséquences en termes de droits humains, établissant un dangereux précédents pour la protection des personnes qui publient des informations classées secrètes dans l’intérêt public. Ses conditions de détention ont été dénoncées par le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture.

Une mobilisation, à laquelle je participerai, sera organisée le 4 janvier devant l’ambassade du Royaume-Uni. J’interpellerai par ailleurs la Ministre des Affaires étrangères, Sophie Wilmès, à ce sujet.

En effet, une série de questions se posent :

  • La Belgique a-t-elle interpellé le Royaume-Uni et/ou les Etats-Unis sur les conditions de détention, le risque d’extradition de Julian Assange et de violation de l’article 3 CEDH ?
  • La Beglique a-t-elle entrepris des démarches, par exemple au Conseil de l’Europe, pour mettre fin à la “torture psychologique” dont est victime Julian Assange, selon de rapporteur de l’ONU ?
  • La Belgique pourrait-elle intervenir pour le sortir de l’isolement et le faire placer d’urgence dans un établissement hospitalier pour y être soigné ?

Quoi que l’on pense de la personnalité d’Assange ou des erreurs que WikiLeaks a pu commettre, la démocratie est face à elle-même. Est-elle encore capable de débattre collectivement de certains sujets ? De défendre la liberté d’informer et ses lanceurs d’alerte ? Est-elle capable de protéger les droits humains en général et les droits d’un homme en particulier ?

Sa détention constitue non seulement une attaque contre le droit à l’information, qui est un pilier fondamental de la démocratie, mais aussi une violation de ses libertés fondamentales :

Pour Amnesty International, le Royaume-Uni doit s’acquitter de ses obligations découlant du droit international relatif aux droits humains, qui interdisent de transférer une personne vers un pays où elle risque de subir de graves violations des droits humains.L’ONG s’oppose donc fermement à une extradition vers les États-Unis où Assange serait condamné à perpétuité (175 ans), rappelant qu’en le transférant, le Royaume-Uni bafouerait ses obligations : lesquelles ?

Pour Human Rights Watch, il s’agit d’une attaque sans précédent contre la liberté de la presse.

Reporters Sans Frontières confirme que l’état de santé de Julian Assange s’est dégradé en prison et réclame sa libération immédiate sur base humanitaire. Cette préoccupation est partagée par plus de 60 médecins.

Mobilisation en Belgique en faveur de Julian Assange

Le collectif « Belgium4Assange », composé d’avocats, de journalistes (dont Vincent Engel), d’universitaires, d’artistes et de militants des droits humains dénonce une attaque frontale des États-Unis envers la démocratie européenne. Carta Academica est une association d’académiques de toutes les universités belges, décidés à s’engager dans des questions de société qui dépassent le strict cadre de leurs compétences scientifiques. Le 29 janvier dernier, plusieurs événements ont eu lieu autour d’Assange et des lanceurs d’alerte, organisés par le collectif Belgium4Assange dont fait partie Carta Academica. Plus particulièrement, Carta Academica a remis les premiers Academic Honoris Causa lors d’une cérémonie au Palais des Académies à Julian Assange, Sarah Harrison, Chelsea Manning et Edward Snowden. De nombreuses personnalités – dont le père de Julian Assange, la présidente de la Ligue des droits humains ou le fondateur de Mediapart – étaient présentes à cette rencontre.

Au-delà du procès de Julian Assange, nous voulons également mettre en lumière des cas moins médiatisés, mais pas pour autant moins inquiétants, de lanceurs d’alerte ou de journalistes d’investigation persécutés dans le monde. Ceux-ci servent l’intérêt général en dévoilant des informations mettant à jour l’évasion fiscale, le non-respect des libertés individuelles ou des scandales sanitaires d’envergure. Pour Ecolo, il est inconcevable que les auteurs, entreprises et les autorités coupables de ces faits restent impunis, tandis que ceux qui dévoilent l’information se retrouvent condamnés.

L’enjeu à venir est donc de protéger les lanceurs d’alerte dans TOUS les secteurs (y compris l’armée et les services de renseignement), pour leur permettre de rendre publics des cas de corruption, de crimes de guerre ou de fraudes fiscales.

À cette fin, une résolution sera bientôt proposée à la Chambre des Représentants par le groupe Ecolo-Groen.