Vote historique : la Belgique reconnaît le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours !

C’EST VOTÉ! La Belgique reconnaît les crimes contre l’humanité et le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours en Chine.

Un moment historique encore inimaginable il y a quelques mois. Je ne vous dis pas mon émotion et ma reconnaissance. Oui, la mobilisation a payé!

Tout a commencé, il y a tout pile 2 ans. Je connaissais peu cette minorité avant que je rencontre avec Saskia et Simon ce papa, Ablimit Tursun, réfugié ouïghour à Gand, dont les 4 enfants et son épouse avaient été arrêtés devant l’Ambassade belge à Pékin. C’était là le sujet de ma toute première question parlementaire au Ministre des Affaires étrangères de l’époque, Didier Reynders. Depuis, la famille d’Ablimit est détenue à résidence et surveillée 24h/24 par la police chinoise. Il ne les reverra peut-être jamais.

Un électrochoc. Je n’avais pas envie d’en rester là. Petit à petit, je me rends compte de l’horreur que subit l’ensemble du peuple ouïghour en Chine: les détentions arbitraires dans des camps de plus d’un million (!) de personnes innocentes, le travail forcé, et les persécutions de masse. Une aberration au XXIe siècle.

J’ai rencontré et me suis lié d’amitié avec Dilnur Reyhan, présidente de l’Institut ouïghour européen, la Belgium Uyghur Association, des rescapé·e·s, la Professeure de sinologie à l’ULB Vanessa Frangville. Toutes ces personnes m’alertaient d’un génocide en cours: “si nous ne faisons rien, d’ici une génération, il n’y aura plus de Ouïghours.”

Les preuves s’accumulent en effet sur les viols systématiques contre les femmes dans les camps, les stérilisations forcées et séparations d’enfants arrachés de leurs parents ouïghours (pour être rééduqués à la Han dans des orphelinats chinois). Un rapport indique que le taux de natalité au sein de la population ouïghoure a chuté de 48,74% entre 2017 et 2019. Du jamais vu.

Comme parlementaire, je ne pouvais rester les bras croisés. Comme juriste, il était temps d’appeler un chat un chat. L’éradication planifiée d’une minorité ethnique, ça porte un nom en droit international : « génocide ». Car oui, en 1948, la communauté internationale avait dit « plus jamais ça » et signait une Convention pour prévenir et réprimer le crime de génocide.

Alors, avec mon équipe, nous avons soigneusement répertorié toutes les preuves disponibles. Et en février dernier, nous avons été les premiers au monde à proposer, dans un parlement, de reconnaître le génocide contre les Ouïghours. Pour envoyer un signal fort à Pékin. Pour faire cesser les atrocités en Chine.

Nous ne nous attendions pas à ce qui allait suivre : d’abord des pressions pour enterrer notre texte à peine déposé au Parlement, puis les sanctions de la Chine contre ma famille et moi.

Ces sanctions se sont avérées contre-productives pour la Chine. En visant le coeur de la démocratie (le Parlement), la Chine a renforcé notre détermination à nous battre pour les droits humains. En nous sanctionnant, la Chine nous a prouvé que notre action gênait … et donc servait bel et bien une noble cause.

Notre Parlement a continué son travail, sans faiblir, en organisant des auditions et un débat de qualité en toute transparence et objectivité. Merci aux collègues, de tout parti.

Si notre pays se tait (“oohh la Belgique est trop petite”, comme certains prétendent), si l’Europe sacrifie nos valeurs fondamentales sur l’autel du commerce international, ou si nous nous rangeons du côté de l’oppresseur, alors il ne faut pas s’étonner que les tyrans amplifient la répression contre leurs peuples. Non, il faut oser se lever contre les discriminations et violations des droits humains, partout, sans relâche !

D’autres pays ont montré la voie. Les parlements du Canada, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de Lituanie et de Tchéquie ont successivement reconnu le génocide des Ouïghours.

Et aujourd’hui, après des mois de travail, je suis à la fois fier et soulagé de pouvoir vous dire que le Parlement belge est la 6e assemblée au monde à briser le tabou. Pour la première fois, nous tirons les leçons du Rwanda et de Srebenica, et nous agissons avant qu’il ne soit trop tard, en prenant toutes les mesures contre un risque sérieux de génocide en cours. Une large majorité démocratique en Belgique (seul le PTB s’abstient) demande de geler l’accord d’investissements entre l’UE et la Chine tant que le travail forcé y restera légion, et même de mettre fin à l’accord d’extradition entre la Belgique et la Chine si la situation perdure. Et ce que j’espère maintenant de tout coeur, c’est que d’autres assemblées emboîtent le pas. Si les démocrates s’unissent, nous pourrons faire changer les choses en Chine.

Notre message est sans équivoque: peu importe le pays (puissant ou non), peu importe votre couleur de peau, genre, religion, apparence, nous avons toutes et tous un droit fondamental à la dignité. Aujourd’hui, notre petit pays est grand, car nous avons osé sauver un peu d’humanité.

Le communiqué d’Ecolo-Groen

Le Parlement belge entre dans l’Histoire en reconnaissant les crimes contre l’humanité et le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours

C’était dans l’air la semaine dernière. C’est désormais officiel. Après le Canada, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Lituanie, et la Tchéquie, le Parlement belge devient la 6e assemblée démocratique au monde à reconnaître les crimes contre l’humanité et le risque sérieux de génocide contre les Ouïghours, en Chine. En commission, les députés – à l’unanimité, moins l’abstention du PTB – ont voté le gel de la Convention d’investissements UE-Chine et la fin de la Convention d’extradition entre la Belgique et la Chine si ces violations perdurent.

Pour le député fédéral Ecolo-Groen, Samuel Cogolati, qui avait été le premier en février dernier à appeler un parlement à reconnaître le génocide ouïghour, il s’agit d’un vote historique encore inimaginable il y a quelques mois : « En 1948, la communauté internationale avait dit ‘plus jamais ça’ et signait une Convention pour prévenir et réprimer le crime de génocide. Aujourd’hui, une large majorité démocratique envoie un signal très fort à Pékin pour faire cesser les atrocités contre les Ouïghours. Pour la première fois, nous tirons les leçons du Rwanda et de Srebenica, nous n’attendons pas et nous agissons avant qu’il ne soit trop tard, en prenant toutes les mesures contre un risque sérieux de génocide en cours. »

Pour rappel, la Convention de l’ONU de 1948 oblige chaque pays non seulement à punir un massacre déjà commis, mais aussi à prévenir tout « risque sérieux » de génocide en cours. La Cour internationale de Justice de La Haye a, en effet, déterminé dans sa jurisprudence que « l’obligation de prévention et le devoir d’agir qui en est le corollaire prennent naissance, pour un État, au moment où celui-ci a connaissance […] de l’existence d’un risque sérieux de commission d’un génocide ». Or, les preuves se sont accumulées ces derniers mois, notamment grâce aux enquêtes d’Amnesty International et Human Rights Watch, sur les graves persécutions dans les camps, comme les stérilisations forcées et séparations d’enfants arrachés de leurs parents ouïghours. Un rapport a même indiqué que le taux de natalité au sein de la population ouïghoure avait chuté de 48,74% entre 2017 et 2019. Une analyse juridique indépendante, co-signée par 30 experts en droit international et sinologie, a aussi conclu à l’existence d’un génocide.

« Il faut oser se lever contre les discriminations et graves violations des droits humains, partout, sans relâche! Et c’est ce que nous venons de faire en brisant le silence, même face aux sanctions d’un pays puissant comme la Chine. Notre message est sans équivoque: peu importe la religion ou la couleur de peau, nous avons toutes et tous un droit fondamental à la dignité. Aujourd’hui, notre petit pays est grand, car nous avons osé sauver un peu d’humanité », conclut Samuel Cogolati.