Le Ministre de l’Intérieur a donné son accord en vue de la construction de bâtiments dédiés au stockage de déchets nucléaires à Tihange. Pour que cette construction voit le jour, Engie-Electrabel doit encore obtenir un permis d’urbanisme auprès de la Région wallonne.
En janvier 2019, Engie-Electrabel a introduit une demande d’autorisation auprès de l’Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire (AFCN) pour la construction d’un ensemble de trois bâtiments sur le site de la Centrale nucléaire de Tihange, visant à stocker les combustibles usés après leur passage en piscine de refroidissement. Le 26 janvier dernier, un an plus tard, cette demande a été accordée par le Ministre de l’Intérieur, Pieter De Crem, par le biais d’un arrêté royal publié ce lundi 3 février.
Je compte à nouveau interpeller le Ministre de l’Intérieur sur ce dossier. Je pointe trois objections de fond pour lesquelles l’AFCN et le Ministre auraient dû refuser la demande d’Engie-Electrabel.
La première concerne la durée de vie d’exploitation. Le rapport préliminaire de sûreté prévoit que l’entrepôt est conçu pour une durée de vie opérationnelle « d’au moins 80 ans ». Electrabel dit clairement que ce délai est conditionné à la solution pour le conditionnement final des déchets nucléaires. Or il n’y a à ce jour aucune solution pour le traitement des déchets nucléaires en Belgique.
La deuxième objection a trait à la taille du hangar, qui représente plus du double de la taille nécessaire. La capacité du bâtiment doit – en principe – permettre 53 emplacements pour entreposer tous les combustibles nucléaires usés depuis les années 90. Or, ce n’est pas le cas. Le bâtiment prévoit 120 emplacements. Engie-Electrabel prévoit donc déjà explicitement qu’il pourrait ne pas respecter la loi de sortie du nucléaire. C’est un très mauvais signal.
Enfin, au niveau des normes de sûreté, je constate l’absence de prise en compte par Engie-Electrabel des scénarii les plus maximalistes, comme la chute d’un avion-cargo de type Boeing 747-8. Or, le site du Tihange est situé sous la route aérienne de Liège Airport. L’étude de sécurité l’annonce clairement : la chute d’un avion est « l’accident qui aurait des conséquences radiologiques supérieures à tout autre situation accidentelle. » L’entrepôt n’est en effet pas sécurisé contre la chute d’avions. Engie-Electrabel l’écrit noir sur blanc : « Le bâtiment SF2 est non bunkérisé ». Ecolo plaide pour qu’il le soit.
Ceci étant, pour démarrer la construction, Engie-Electrabel a encore besoin d’un permis d’urbanisme délivré par le Ministre wallon de l’urbanisme. Sa décision est attendue dans les prochaines semaines.
Mon complice à la Région, Rodrigue Demeuse, fera tout pour que le Ministre refuse d’octroyer ce permis d’urbanisme, tout en élargissant la réflexion : « Ce projet a potentiellement de telles conséquences qu’il me semble vraiment important d’élargir la réflexion au-delà de la seule question d’aménagement du territoire. Ce n’est pas un projet comme les autres… Il est question d’un possible entreposage jusqu’en 2100 ! Avec des garanties très faibles à long terme. Il est notamment essentiel de rester attentif aux remarques très pertinentes, entre autres liées à la sécurité, émises par les communes et les riverains ».
À cet égard, tant Rodrigue que moi regrettons le fait que l’AFCN ne justifie d’aucune manière en quoi les arguments développés par les riverains et collèges communaux contre le projet ne sont pas fondés. Dans l’arrêté royal, l’agence fédérale se contente d’énumérer les objections citoyennes et politiques, sans plus d’explications. Pour nous, il est important d’avoir un dialogue beaucoup plus transparent et nourri, plutôt que de mettre les citoyens devant le fait accompli.
Venant tous les deux de Huy, notre préoccupation en la matière reste de tout mettre en oeuvre afin d’empêcher un désert radioactif à Tihange.