J’ai rencontré Richard à Kinshasa. J’avais été marqué par son projet de doctorat : trouver une solution juridique pour protéger le peu de biens délaissés par les personnes forcées de fuir sa province du Nord-Kivu à l’Est du Congo… Lui qui a grandi et vit toujours avec sa famille dans cette région en proie aux pires violences depuis un quart de siècle, sait de quoi il parle. Les massacres à la machette là-bas n’épargnent personne : certainement pas les civils, ni les femmes, vieillards ou enfants. Pas même sa famille ou ses amis. Les victimes se comptent par millions. Lui-même a déjà dû fuir sa maison 5 à 6 fois : des dizaines de kilomètres à pied parcourus, emportant avec lui en urgence ce qui pèse le moins lourd, pour rejoindre un refuge de fortune, et puis une fois de retour, retrouver sa maison et son bétail « soit pillés, soit incendiés ». Et quand je lui demande « pourquoi », il me répond sincèrement qu’il ne comprend pas.
Pour moi, étudier le droit international (“ius gentium”, le droit des gens) n’a jamais été une fin en soi : c’est comme apprendre à manier un bouclier pour protéger les valeurs fondamentales de solidarité et justice qui fondent l’humanité. Et pour Richard, le moins que l’on puisse dire, c’est que le droit international humanitaire n’existe pas que dans les livres. Il est venu ici en Belgique pour faire avancer sa recherche. Son rêve est de construire une ONG de défense des droits humains au Congo (« la politique, ce n’est pas trop mon truc… enfin, surtout quand elle est corrompue »). Son combat est juste. Voilà pourquoi je vous raconte son histoire. La guerre qui ruine son pays est largement ignorée ici. Cette indifférence m’indigne. Voilà pourquoi je lui avais promis à Kinshasa que, dès qu’il arriverait en Belgique, je l’accueillerais au Parlement. C’est chose faite. Et je me réjouis de concrétiser avec lui certains de nos idéaux communs.