Auditions sur les Ouïghours au Parlement : on ne lâchera rien !

Ces mardi 18 et mercredi 19 mai se tenaient des auditions décisives au Parlement en vue de faire toute la lumière sur le génocide en cours contre la minorité musulmane ouïghoure.

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Première personne auditionnée, la professeure de sinologie à l’ULB, Vanesse Frangville. Pour elle, “la liste des éléments qui ont alarmé la communauté académique sur la question du génocide ouïghour est longue. Les pistes sont si nombreuses que je ne vais pouvoir les énumérer toutes.” Et d’affirmer qu’il ne faudra “sans doute pas attendre plus d’une génération avant que la communauté ouïghoure soit complètement détruite, d’où la nécessité d’agir et d’envoyer un signal fort à Pékin.”

C’est ensuite Koen Stoop, représentant du World Uyghur Congress, qui a pris la parole en qualifiant de “capitale” la reconnaissance du génocide ouïghour par notre Parlement : “Tortures, viols, détentions forcées, camps de rééducation, stérilisations forcées… l’intention du régime communiste chinois est de détruire la minorité ouïghoure. (…) Il est capital que la Chambre reconnaisse le génocide.”

Après l’exposé du point de vue de Ng Sauw Tjho, ancien candidat PTB/PVDA, qui a défendu le fait que Pékin voulait lutter contre le djihadisme islamiste, c’est Qelbinur Sidiq qui a eu le courage de témoigner. Un courage qui force l’admiration : c’est la première fois qu’une rescapée des camps de la honte ose s’exprimer publiquement devant un Parlement. Tout au long de son témoignage, qui a permis de prendre la pleine mesure du drame humain se produisant sous nos yeux en Chine, il régnait une émotion palpable au sein de la salle d’audition.

Sa prise de parole a résonné comme un cri. Je la cite : “J’ai dû enseigner le Chinois dans les camps. J’ai vu les tortures. 90% des détenus avaient 18 à 40 ans. Les gardiens ne les considéraient pas comme des êtres humains. (…) J’ai dû attendre 4 heures dans une file pour être stérilisée de force. Je suis handicapée à vie. Je ne l’oublierai jamais. (…) Ma sœur et mon frère ont été menacés. Je suis intimidée depuis 2 semaines pour ne pas parler ici. Pour ne pas dire la vérité. (…) Je dénonce les crimes de la Chine au prix de la vie de ma famille. Ce que je vous dis maintenant, ce n’est qu’une partie des crimes commis par le gouvernement chinois. Je suis une des chanceuses ayant échappé aux crimes du gouvernement chinois. (…) J’appelle tous les pays, y compris la Belgique, à dénoncer les crimes de la Chine contre le peuple ouïghour comme un génocide. Je souhaite que la communauté internationale traite ce problème ! Il s’agit de votre responsabilité en tant qu’êtres humains.”

Au lendemain de cette première journée (intense) d’auditions, c’est au tour de la baronne Helena Kennedy QC, avocate et membre de la House of Lords, d’affirmer l’existence d’un génocide : “Yes, there is a genocide in progress against the Uyghur minority. The voice of Belgium, your voice is important. And I hope you will use it.”

Dans la foulée, le professeur de droit international à l’ULB, François Dubuisson, a indiqué qu’il était “difficile de conclure de manière indubitable à l’intention génocidaire. En revanche, on ne peut exclure un risque de génocide contre la minorité ouïghoure. Ce risque nous oblige à prévenir un possible génocide.”

De mon côté, j’insiste sur le fait que ces auditions n’étaient pas « contre » la Chine. Notre Parlement est indépendant. Seul le respect le plus strict du droit international doit nous guider dans notre action.

C’est aussi ce que nous avons fait sur les Rohingyas. Même s’il n’existe pas d’arrêt définitif de la Cour internationale de Justice, nous devons prendre toutes les mesures pour prévenir tout risque de génocide contre cette minorité musulmane. C’est ce que nous avons demandé.

C’est aussi ce que nous ferons sur les Yézidis à la demande du collègue Dallemagne.

La souffrance humaine est la même, peu importe la religion, le pays ou l’origine. Et nous agirons partout où la dignité humaine est en danger, partout où un peuple est menacé d’extinction.

Vu par Arte
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