Cette semaine, un mois après les élections au Bélarus, j’accueillais au Parlement quatre figures de la société civile bélarusse basées à Bruxelles. Elles s’appellent Olga Hart, Hanna Stähle, Yuliya Miadzvetskaya et Eugenia Andreyuk. Toutes des femmes, occupées à mettre sur pied un bureau de liaison de l’opposition bélarusse et de son Conseil de Coordination National, de façon à pouvoir dialoguer avec les instances belges et européennes.
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Comme parlementaire belge et vice-président de la Commission des relations extérieures à la Chambre, je tenais à pouvoir échanger avec elles sur l’évolution très dynamique de la situation sur place et notamment sur le sort des milliers de manifestants et (surtout) manifestantes encore retenu(e)s en détention et soumis(es) à des traitements dégradants et des tortures pour le simple fait d’être descendus dans la rue afin de revendiquer leur droit à des élections justes et transparentes, sans interférence extérieure.
Outre cette revendication, les quatre activistes rencontrées au Parlement m’ont partagé leurs pistes d’actions pour que la Belgique soutienne concrètement les Bélarusses : de la sensibilisation de l’opinion publique aux bourses pour étudiants, en passant par le soutien aux sportifs comme aux médias indépendants, sans oublier l’octroi de visas humanitaires pour les défenseurs des droits de l’Homme et activistes menacés, l’éventail des actions à mener est large.

Je pense en effet qu’il importe de ne pas se limiter à la menace de sanctions et qu’il faut pouvoir envisager toutes les mesures de soutien que nous pourrons apporter à l’expression de la volonté pacifique du peuple bélarusse. Naturellement, il ne s’agit pas d’être naïf et ce serait une erreur politique d’offrir à Poutine l’occasion qu’il attend de pouvoir répéter un scénario à l’ukrainienne en prétendant que ces manifestations sont télécommandées depuis l’Union européenne. Il convient donc d’offrir un soutien ciblé à des actions qui existent déjà mais qui n’en sont pas moins menacées logistiquement par l’intensification des rétorsions du régime :
- un budget extraordinaire en faveur du maintien de la chaîne de télévision bélarusse indépendante Belsat qui émet depuis Bialystok (en Pologne) ;
- prévoir des visas humanitaires en Belgique et plaider auprès des pays du groupe de Vysegrad qui avaient refusé de participer aux quotas de répartition des migrants au motif qu’ils devaient maintenir une capacité d’accueil en cas d’instabilité dans leur voisinage oriental afin qu’ils honorent leurs engagements de l’époque et offrent des solutions d’asile aux Bélarusses ayant à souffrir des persécutions politiques ;
- protéger et soutenir financièrement l’observatoire du respect des droits humains, Viasna, qui mène un courageux travail d’information dans une période où cela lui est expressément interdit ;
- pour l’allocation de fonds européens à la cyber-sécurité du serveur Nexta, basé en Pologne, depuis lequel est diffusé l’essentiel de l’information numérique indépendante au Bélarus ;
- pour l’allocation de bourses d’études pour les étudiants qui auront été exclus de leurs facultés et hautes écoles pour avoir participé aux protestations ;
Encore récemment, Maria Kolesnikova, figure centrale du présidium du Conseil de Coordination de l’opposition, a été emmenée de force dans une camionnette en plein cœur de Minsk. Ses ravisseurs ont pris la direction de l’Ukraine pour l’y déporter. Elle a profité d’un moment d’inattention pour… déchirer son passeport ! Sans document et donc inhabilitée à franchir la frontière, le régime a dû se résoudre à procéder à son arrestation officielle.
C’est de la même détermination et de la même intelligence dont nous avons pu être les témoins lors de notre rencontre. Avec des opposantes de cette qualité, le régime de Loukachenko a bien raison d’avoir peur, et donc nous de craindre les extrémités auxquelles la panique pourrait l’amener à recourir.
Comme les quatre opposantes l’ont martelé à l’unisson : « Pour la première fois en 25 ans, nous avons de l’espoir. Les gens veulent le changement. C’est maintenant ou jamais ! »
Solidarité avec les Verts au Bélarus
Parmi mes collègues du parti vert bélarusse, la situation est aussi très grave. La leader des Verts au Bélarus, Iryna Sukhiy, est d’ailleurs détenue depuis le dimanche 6 septembre soir pour avoir participé à une manifestation non autorisée à Minsk. Il est extrêmement difficile de rentrer en contact avec les autres membres du parti vert. Les coupures Internet sont fréquentes. Il n’y a plus un seul numéro de téléphone sur lequel il est possible de les joindre sans les mettre en danger. Le parti vert européen a déjà réagi et demande la libération immédiate d’Iryna Sukhiy. De mon côté, faute de pouvoir leur apporter un soutien directement sur place, il me semble d’autant plus important de soutenir la société civile bélarusse qui se lève ici aussi en Belgique contre la dernière dictature d’Europe.